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Empreintes du jour
17 novembre 2017

Deuil

Bernard

Mes sœurs frères cousines cousins s’en souviennent

Nous t’appelons non pas « mon oncle »

C’est trop commun trop dans les convenances

Nous t’appelons « petit mon oncle »

Appellation enfantine et tendre

Pour dire notre connivence

En fait tu es mon grand frère

Qu’à chaque vacance petite ou grande

Je souhaite tant retrouver.

 

Bernard petit mon oncle

Tu as 18 ans, j’ai 8 ans

Et du haut de ta jeunesse

Tu éclaires mon enfance pâle

Nous sommes en 1960

 

A la ferme en pays familier où tu reviens

Règne une atmosphère de fête

Grand frère tu te plies en deux

Pour nous extraire un sourire

Ces rais de soleil journaliers

Pour nous faire jaillir des fous rires

Torrents  bienfaisants remontant

Du profond de la gorge

Des galopins que nous sommes.

 

Dans la pâture

Fleurie de vaches étonnées

Peuplé de vieux pommiers

A tes côtés

Ma sœur et moi jouons

Courons à perdre haleine

Croquons à pleines dents la pomme.

 

A l’ombre d’un bouquet de frênes

Que nous appelons le petit bois

Après le dur labeur de la matinée

Après le frugal repas

Nous faisons à trois une sieste enjouée

Grand frère de nos ébats

Tu es l’artisan

Tu en es l’âme de chair

Et de nos frissons.

 

Dans la grande chambre

Près du lit déserté de nos tantes

Habite l’harmonium

Et de tes grandes mains alertes

Tu lui donnes vie

Debout de chaque côté

Jeunes pousses ravies

Nos cordes vibrent à l’unisson.

 

Ainsi se passe l’enfance à la ferme

Entre le labeur quotidien

Pour nos frêles pognes

 Et nos espaces d’insouciance

Forts de ton affectueuse mais trop rare  présence

 

Quelques années passent

Ensemble nous ébauchons

Mes sœurs frère, cousines cousins

Ici s’en souviennent

Au cœur de l’enfance

Ou au seuil de l’adolescence

Des escapades des échappées belles

En roue libre

Tu en es le moteur

Le généreux essaimeur

De légèreté et d’allégresse 

 

 

Exquises embellies

Qui se renouvellent trois années durant

Nous empruntons les chemins de traverse

Dormons dans la paille

Fuyons les jours gris

Essaim libre parmi les aubépines

Ah l’enfance réconciliée enchantée

Par la faveur du grand frère

Bernard tu as éclairé notre enfance

Tu adoucis aussi notre adolescence.

 

Plus tard nous écumons les bals populaires

En Allemagne tu m’emmènes

Pour travailler pendant les vacances

Sur l’oreiller de l’auberge

Tu me fais des confidences

Tu t’ennuies de ta belle

Ton amoureuse a le doux nom de Thérèse.

 

Et puis comme le chantait Mouloudji

« Que le temps passe vite

Hier nous  étions encore enfants

Un cœur tout neuf comme un printemps

Et des rêves dans chaque crique »

La vie suit sa course riante et grave

Naissent et grandissent Julie isabelle olivier

Tendre père tu t’émerveilles de tes trésors

Et les entoures de tes bras protecteurs

Jusqu’à l’envol vers d’autres bras, vers un autre nid

Comme tu as raison d’être fier !

 

Et voilà qu’un terrible ennemi inconnu t’assaille

Toi qui es si paisible si rétif aux excès

Avec une immense douleur, avec courage

Impuissants, Thérèse et les enfants assistent

A l’avancée du monstre

Tu prives ton entourage de ta parole limpide

Ainsi se tarit l’eau douce d’une source

Et soudain la nuit t’enveloppe de son manteau de silence

La- haut brillent la grande ourse

L’infini et son charriot d’étoiles

En bas la terre est devenue trop étriquée

Si décolorée

Tu pars si tôt pour l’autre monde

Sur la pointe des pieds

 

Grand frère nous sauvegardons

Au bord des lèvres des bouffées de paroles

Au fond de nous l’image vibrante

D’un être cher, d’un être bon

D’un être ouvert tu es tout cela réuni

Quelqu’un qui a habité humainement

Fraternellement, pacifiquement la terre

Et ta discrète et rassurante présence

Nous manque déjà.

 

Marc

 

 

 

 

 

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