Le poète
A la nuit du livre
Pour Archibald seul sur scène ce soir
Quel régal
Quel feu de joie
Quand l’autre n’est que d’artifice
Poudre aux yeux
Des étoiles de la voie lactée
Le poète est un albatros
il faut avoir des ailes
des antennes de soie
et de l'autre
pour ondoyer au dessus des huées
et y être mêlé jusqu'au cou
jusqu'aux coups.
Le poète est l’incompris
Des volatiles vivant en cage
L’artiste est un insoumis
Aux diktats du monde marchand
Et quand il ne vole pas
Il marche sur la tête
Pour mieux saisir les travers
De ses semblables
Et leurs prouesses
Au quotidien troué
Cigales fourmis rapaces
Le poète aime et magnifie
Les choses de la vie
Les gens d’armes et d’argent
De savoir sclérosé
Et qui se labellisent éclairés
Sont à mille lieues de ce pays
De cette île pacifique
Nourrie de l’écume des jours
Le poète vit dans le fumier du monde
Mais son œil le porte au-delà
Si loin si haut Qu’il est seul
A éructer sa chanson d’amour
A psalmodier sa plainte
Jamais désespérée
Il accouche dans la douleur
De pépites de chair et de sang
C’est son enfant
Qu’il présente au fanum
Des va-nu-pieds
L’homme qui compose
Sans mémoire
Avec la foule avec l’informe
Avec le poétiquement correct
N’est pas un poète
Mais un vendeur de foire
Un faiseur de soupe
Un bateleur avide
A vide
Le poète compose crée travaille
Avec la chair des mots
Avec les tripes
Avec les sens révulsés
Il est nu comme l’enfant
Qui vient au monde
Il pétrit à pleines mains
Une pâte hypersensible
L’humain rabaissé humilié
Emerveillé
De sa voix fragile émane
Un chant universel
Notre part de lumière
C’est de l’intemporel
Etincelles de l’éternel.