Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Empreintes du jour
16 avril 2015

Peur brune

  1. " De toute évidence l'autorité n'est pas synonyme de brutalité, de sévérité excessive, de violence. Elle représente une forme d'amour offerte à ceux qu'on aime. Elle peut être douce comme le miel." Moussa Nabati : le bonheur d'être soi

(Texte écrit au lendemain des élections départementales. Les policiers dont il est question ici vinrent bien à la porte de ce centre culturel pour les raisons indiquées ci-dessous.)

Hier matin, devant le centre culturel de la petite ville de province, deux policiers en uniforme faisaient les cent pas, attendant que les portes s’ouvrent. Ils avaient déjà sonné plusieurs fois. Pas de réponse. Leur visage fermé, leur trépidation incessante exprimait l’impatience.  

A l’intérieur pourtant les employés étaient bien présents, réunis dans la salle d’expositions. Ils avaient vu les uniformes. Mille questions fusaient et personne ne prenait l’initiative d’ouvrir les portes. Le chef de service s’était retranché derrière un bureau.

 

Parenthèse pour expliquer le contexte et éclairer la situation, mais vous pouvez très bien la sauter et aller voir tout de suite plus bas…

(Hier c’était le deuxième tour des élections départementales. Restaient en liste trois candidats : un d’extrême droite, recueillant le plus de voix ( mais quelles voix ? nostalgiques de « l’ordre nouveau », vieux comme le fascisme, si peu, ou alors exclues du discours argumenté, manipulées par les sirènes vociférantes de la purification (sic !), voulant que les vieilles souches restent entre elles et préconisant de revenir au franc, (ah la belle époque de Clovis et de puis un peu plus tard, dans le même esprit, celles des Charles Magne et Martel, qui a arrêté, lui ! les sarrasins à Poitiers !), l’entre soi quoi…des gens blancs de peau, ayant des siècles et des siècles de culture nationale, la meilleure, pour ne pas dire la seule. Un de droite, qui tenait un langage un peu différent, mais si peu. Pas de retour au franc, mais privilégier les vieilles souches expérimentées et surtout pas de sauvageons, ayant poussé sous le macadam des banlieues et des faubourgs donc sans racines, sans tuteurs, n’ayant pas les mêmes valeurs. L’identité nationale, voilà le concept clé, à enfoncer dans la tête des gens et économiquement répandre le libéralisme à outrances, voilà pour le catéchisme.  Et puis un troisième, rose pâle, mais qui n’affiche même plus la couleur délavée tant elle lui semble dépassée, ringarde : il se dit libéral sans être ultra, la social-libérale démocratie se dissolvant dans un capitalisme éclairé, à visage « respectable », encadré par des multinationales guerrières et autres entreprises conquérantes. Le salut vient par la croissance et elle reviendra, foi d’énarques !) Parenthèse fumeuse fermée.

 

 

Donc les questions fusaient à l’intérieur du centre culturel.

-  Pourquoi des policiers à cette heure ? Mais que veulent-ils ?

Chacun se regardait d’un air soupçonneux.

-         Quel méfait as-tu commis pendant cette nuit de pleine lune ?

-         Le Front est passé dans la ville. Les premières représailles ?

-         Ils en veulent aux associations dites politiques, tendancieuses…

-         Nous ne sommes politiques, seulement culturels, dit le chef.

-         Question politique culturelle, on pourrait faire mieux !

-         Bon çà suffit ! Que fait-on ? On se barricade à l’intérieur ?

-         Nous les faisons entrer ? De toutes façons, ils s’introduiront de gré ou de force. Evitons l’esclandre !

-         Qui tend les mains pour les menottes ?

-         Oh  cessez cet humour douteux !

-         Et si tout de suite quelqu’un alertait la presse locale…

-         Oui mais quelle presse ? Vous savez bien que beaucoup applaudissent, exultent même.

-         Oh n’exagérons pas !

-         En tous cas ils vont en faire leurs choux gras !

-         Bon je vais revoir tout de suite ma programmation, du moins l’affiche. D’abord les voix tziganes ! Avons-nous en réserve quelques voix bien françaises ?

-         Retirons aussi le rappeur du coin ; Pas bon effet

Nouveau coup de sonnette. Strident. Prolongé. Inquiétant.

Le secrétaire, téméraire, se dirigea la porte. L’air froid et hostile s’immisca par l’ouverture. Un souffle hivernal venant des ténèbres de la nuit.

-         Bonjour mesdames, messieurs.

-         Bonjour messieurs les gendarmes. Mes respects.

-         Non, non ma petite dame, nous sommes de la police municipale.

-         Mais quel…bon vent…quelle … affaire vous amène ici ?

-          Voilà, voilà. Notre visite n’est pas d’ordre professionnel, contrairement aux apparences. Nous désirons seulement, Karim et moi-même nous inscrire à votre proposition de création ouverte aux amateurs… « les Arts Verts ». Une fois n’est pas coutume, mon compagnon et moi-même, avons envie de …lézarder avec votre concours.

-         Mais bien sûr, vous êtes les bienvenus. En vous voyant gesticuler à travers la fenêtre, nous avons eu tellement peur !

-         Il y a de quoi. Mais rassurez-vous…Pour cette fois-ci. Ils ne sont pas passés. Alors faites encore plus chaque jour que votre maison soit la maison du peuple. L’artiste n’est-il pas là pour nous émouvoir et nous ouvrir les yeux. A tous. Au diable l'élite ! Et l’âge de pierre ne sera pour demain. Et puis, encore un mot, même si beaucoup de faits contredisent cette appellation, nous sommes avant tout gardiens, garants de la paix.

-         Voilà des propos rassurants, par les temps menaçants qui courent.

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Empreintes du jour
Publicité
Archives
Pages
Newsletter
1 abonnés
Visiteurs
Depuis la création 6 882
Publicité